mardi 30 octobre 2012

Passation des Marchés publics en Côte d'Ivoire



Dr Toualy Herman, Spécialiste en passation des marchés publics : «  Les fausses garanties d’offres et de bonne exécution…faussent le jeu de la transparence »

Quelle définition peut-on donner au métier de Spécialiste en passation des marchés ?
Le spécialiste en passation des marchés est la personne ressource chargée de planifier et d’acquérir, en application des règles et procédures établies, des fournitures, des travaux, des services et des prestations intellectuelles pour appuyer la mise en œuvre des programmes des maîtres d’ouvrage. Il intervient également comme contrôleur qualité du processus de passation de marchés, en s’assurant que le processus d’acquisition de biens et services se fait dans des conditions d’efficacité, de transparence et d’équité au regards des textes dictés par les différentes législation en vigueur.
Il faut dire qu’aujourd’hui, il n’existe pas de formation diplômante au métier de passation des marchés. Vous trouvez dans notre métier, des juristes, des financiers, des ingénieurs de travaux publics, et même des cadres de la santé.

Pourquoi avez-vous senti la nécessité de créer une association des spécialistes en passation des marchés en Côte d’Ivoire?
Il faut préciser que nous ne sommes pas une association, mais plutôt un réseau. Le réseau de spécialiste en passation de marchés de Côte d’Ivoire (RSPM-CI)  a été créé en octobre 2011, et est né de la nécessité de fusionner nos énergies et forces en vue de partager les expériences entre les différents spécialistes en passation des marchés, de défendre les intérêts de notre métier, d’œuvrer au renforcement des capacités des spécialistes en passation des marchés, et enfin de promouvoir le métier de spécialistes en passation des marchés.
Quelle est la perception des acteurs (publics et privés) de la commande publique  aujourd’hui  en Côte d’ivoire?

Il faut noter d’abord que la commande publique représente des sommes énormes. La passation des marchés est une discipline qui est très complexe et qui a toute sa raison d’être du fait de la nécessité des gouvernants à aspirer à la bonne gouvernance. Elle a pour objectif un emploi rationnel des ressources publics, par le jeu de la concurrence, afin d’avoir un meilleur rapport qualité prix.
Il y a une méfiance légitime ou non des acteurs privés par rapport à la transparence du système. Mais nous pensons que les choses évoluent surtout avec la création de l’Autorité nationale de régulation des marchés publics.

En 2010, l’Autorité nationale de régulations des marchés publics (Anrmp) susmentionnées a été créée. Vous, en tant que spécialiste, quel est son positionnement dans le cadre du dispositif institutionnel des marchés publics en Côte d’Ivoire ?
Cette autorité a un peu un rôle d’arbitre entre les autorités contractantes (maitre d’ouvrage)  et les candidats aux marchés publics. De la capacité de cette entité à jouer sa partition avec impartialité et dans le respect de la rigueur de la loi dépendra sa crédibilité. Au vu des actions menées par cette autorité, à savoir la sensibilisation et la formation des acteurs de la commande publiques et surtout au regard des décisions déjà prises, on peut déjà dire que l’ANRMP assure pleinement sa mission dans le cadre des attributions qui lui sont dévolues.
Comment percevez-vous le problème de l’accès des PME ivoiriennes aux marchés publics en Côte d’Ivoire ?
Le problème est plus complexe que cela. L’accès des PME aux marchés a toujours été, y compris dans les pays développés, une sorte de dépit amoureux entre l’administration et le secteur privé. Seules des rencontres périodiques, permettant de débattre des problèmes liés à l’accès des PME en termes de capacité, d’accompagnement financier et de simplification des procédures, pourraient être, de notre simple point de vue, une approche à la résolution de ce problème supposé ou réel.
A un moment donné, il y a eu beaucoup de gré à gré dans les marchés publics en côte d’ivoire. Qu’elle est votre appréciation sur ce type de marché ? Quelle est l’évolution actuelle par rapport aux marchés de gré à gré.
Aujourd’hui la tendance semble heureusement s’inverser et c’est tant mieux. La dernière réforme du code des marchés publics y a contribué pour beaucoup.
Pensez-vous vraiment que les récentes réformes des marchés publics en  Côte d’ivoire ont permis de hisser le dispositif juridique et institutionnel au niveau des  standards internationaux en matière de passation des marchés ?
L’Etat de Côte d’Ivoire  a procédé, ces dernières années, à une réforme en profondeur du cadre légal, réglementaire et institutionnel des marchés publics qui se rapproche sensiblement des standards internationaux dans le domaine. Des aménagements à la pratique pourraient être nécessaires à  l’avenir en accords avec tous les acteurs de la commande publique y compris les bailleurs de fonds.
Quelle sont les relations de votre réseau avec la Direction des marchés publics (Dmp) et l’Autorité nationale de régulation des marchés publics (Anrmp) ?
Nous avons de très bons rapports fonctionnels avec  la Dmp et  l’Anrmp et nous espérons leurs  approfondissements en vue d’une synergie de force pour contribuer à une optimisation de la commande publique dans notre pays.

Vous avez organisé récemment un diner d’échanges autour du thème «Les garanties et l’utilisation du crédit documentaire dans les marchés publics : modalités d’émission, de mise en œuvre et lutte contre les fraudes », qu’est ce qui a motivé ce thème ? Qu’est-ce qu’on peut retenir d’essentiels de ces échanges
Je voudrais profiter de cette occasion pour remercier l’Association des sociétés d’assurances de Côte d’Ivoire (Asa-Ci) et l’Association professionnelle des banques et établissement financiers de Côte d’Ivoire (Apbef-Ci) qui ont accepté, par leurs représentants respectifs d’animer ce diner d’échanges.
Plusieurs constats ont motivé ce thème. D’abord dans l’exécution des marchés publics, il existe de fausses garanties d’offres et dans certains cas de fausses garanties de bonne exécution.  Ensuite, on note également une interpellation par les PME sur les difficultés qu’elles rencontrent à obtenir des garanties auprès des établissements bancaires et financiers dans le cadre des appels d’offres.
Un autre constat qui en ressorti est que dans le cas d’appels d’offres internationaux, le crédit documentaire est très utilisé pour sécuriser les transactions entre l’acheteur et le fournisseur. Cependant, dans la pratique la mise œuvre de ce mode de paiement n’est pas souvent maîtrisé par les acteurs publics de la commande.
Dans l’ensemble, trois points essentiels sont à retenir des échanges : d’un, la nécessité d’une harmonisation entre les dispositions nationales, les pratiques  de l’Ohada et les directives ou règlements de certains bailleurs notamment la Banque mondiale en matière d’émission et d’appel de la garantie/caution. De deux, la mise en place d’un mécanisme de vérification et d’authentification des documents émis aussi bien par les Banques que par les compagnies d’assurances pour éviter les fraudes. Et enfin de trois, concernant le crédit documentaire, assurer un renforcement des capacités des acteurs de la commande publique sur ce mode de paiement.
Interview réalisée par
GOORE Bi Hué


mercredi 24 octobre 2012

Questions economiques: Finances publiques

Questions economiques: Finances publiques: La Côte d’Ivoire, championne du marché financier régional En termes athlétiques le champion, c’est celui qui a travaillé avec acharn...www.yahoo.frwww.facebook.com

Finances publiques



La Côte d’Ivoire, championne du marché financier régional

En termes athlétiques le champion, c’est celui qui a travaillé avec acharnement, qui s’est donné les moyens en dépit des conditions d’entrainement difficiles, très difficiles même, pour participer et remporter une compétition, une course, un trophée. Transposée dans la gestion des finances publiques, notamment dans la recherche d’une «victoire» sans ambages dans la mobilisation des ressources financières conséquentes par appel public à l’épargne, quel que soit l’environnement –hostile ou favorable – pour financer ses engagements régaliens, l’Etat de Côte d’Ivoire apparaît, à l’évidence, comme le champion de la collecte publique d’argent sur le marché financier régional. Et ce, depuis de longues années déjà ! Son dernier appel public à l’épargne, lancé en août 2012, via la Bourse régional des valeurs mobilières (Brvm) dont Abidjan abrite le siège régional, pour collecter par le biais d’un emprunt obligataire TPCI 6,5% 2012-2017 d’un montant de 60 milliards de Fcfa au prix d’obligation de 10 000 Fcfa l’obligation, n’a fait que confirmer sa position de champion du marché financier régional. Alors que l’Etat recherchait sur une courte période allant du 06 août au 14 septembre 2012, 60 milliards de francs Cfa nécessaires au financement des investissements publics inscrits au budget 2012, il en a mobilisé au dire du directeur général du Trésor et de la Comptabilité publique, Koné Adama, 92 965 906 750 Fcfa, soit 155%. C’est un exploit qu’on ne saurait passer sous silence. Surtout quand l’on sait que cette opération a été lancée dans la période des premières attaques contre les forces républicaines de Côte d’Ivoire. La précédente opération ayant couvert la période du 23 avril au 22 mai 2012 (TPCI 6% 2012-2015) avait, elle, mobilisé 71,9 milliards de Fcfa. Donc en l’espace de six mois, le pays a pu collecter environ 164, 866 milliards de francs sur 120 milliards recherchés initialement.
Mais la position de leader du marché financier régional en termes d’appel public à l’épargne de la Côte d’Ivoire, comme susmentionné, remonte à plusieurs années déjà. Depuis 1999, l’emprunt TPCI 8% 1999-2002 au travers duquel l’Etat ivoirien recherchait 15 milliards de Fcfa s’était soldé par un succès inattendu. Car 30,2 milliards avaient été collectés, soit un taux de réalisation de 202%). L’emprunt public qui a suivi (Tpci 2002-2005, aux taux de 7%), lancé le 10 juin 2002 pour avoir 30 milliards de Fcfa, a quant à lui enregistré une plus-value de 34 milliards de Fcfa, permettant ainsi à l’Etat d’avoir dans sa caisse la bagatelle de 64 milliards de nos francs. Soit 213%. Mais la plus grande performance de la Côte d’Ivoire se situe en 2005 où l’emprunt Tpci 2005-2008, émis le 15 juillet 2005 au taux de 6,5% s’est soldé par 86,1 milliards de Fcfa mobilisés alors qu’il tablait sur 40 milliards. Ce qui représente 215%.
Ces bonnes performances n’ont fait que renforcer la conviction de l’Etat de Côte d’Ivoire que sa signature est respectée et constitue un gage et donc une « assurance tous riques » pour les souscripteurs aux emprunts qu’il émet sur le marché financier et monétaire régional. Aussi, va-t-il revoir ses prétentions à la hausse à partir de 2008, en recherchant par appel public à l’épargne (Tpci 6,25% 2008-2011), un montant de 60 milliards de Fcfa. Il a puis avoir 61,2 milliards. En 2009, il même pu disposer de 107,3 milliards de Fcfa alors qu’il n’en demandait que 60 milliards! Soit 179% de succès. Même au sortir de la crise post-électorale où l’incertitude était de mise, le pays a pu obtenir sur le marché 160,2 milliards de Fcfa alors qu’il était en quête de 100 milliards. La seule année où le résultat a été «décevant» est 2010 à cause de la forte incertitude sur l’avenir et les signaux pessimistes qu’entrevoyaient les analystes financiers et économiques. En effet, sur 62 milliards dont avait besoin l’Etat en allant sur le marché financier régional, il n’en a récoltés que 22,9 milliards.
En tout état de cause, la Côte d’Ivoire demeure championne de l’espace Uemoa en termes de mobilisation financière sur le marché régional. Parce que la crédibilité de sa signature qui se traduit par le respect régulier de ses engagements vis-à-vis de ses créanciers, en dépit des crises successives, en est une raison fondamentale. De même que sa capacité et son poids économiques. La Côte d’Ivoire n’est-elle pas le leader de l’Union économique et monétaire ouest-africaine où elle détient, seule 40% du pouvoir économique de cet espace?
GOORE Bi Hué